Savoir dire non, c’est l’art de négocier pour préserver son activité
Lorsque l’on initie un projet entrepreneurial basé sur une offre de services, il est parfaitement naturel de se tourner d’abord vers son réseau de proches : sa famille, ses amis, ses anciens collègues… pour trouver ses premiers clients. Ces personnes sont souvent les premières à croire en vous, ou du moins, à vous écouter.
Mais cette proximité peut rapidement se révéler contraignante. Parmi ces proches, certains, conscients de la jeunesse de votre structure, vont chercher malicieusement à en tirer parti. Ils négocieront au maximum vos tarifs à la baisse, parfois avec véhémence. D'autres, invoquant des liens d’amitié ou de parenté, insinueront que vos services devraient leur être offerts gratuitement.
Face à cela, il faut arriver à faire concorder les demandes de votre entourage avec les intérêts stratégiques de votre entreprise. Et si cette conciliation est impossible, il faut savoir refuser clairement, respectueusement, mais fermement. C’est une condition sine qua non pour assurer la survie et la croissance de votre activité.
L’impact du contexte socioculturel
En Afrique, au sud du Sahara, certains systèmes de valeurs fondés sur la solidarité familiale, l’obligation morale envers les aînés ou la culture du “don” à tout venant rendent le refus de l’entrepreneur délicat. Beaucoup de jeunes porteurs de projet, en l'absence de formation sur les fondamentaux du commerce, peinent à dire non. Et ils ressentent durement les sollicitations répétées et déséquilibrées dans leurs finances.
Pour ceux qui se décident à refuser, c’est souvent de manière abrupte, sans les codes de communication appropriés, ce qui va heurter et créer des tensions inutiles.
La négociation, un art qui s’apprend
Refuser ne veut pas dire rejeter ; cela suppose de maîtriser quelques techniques de la négociation. Car négocier n’est pas réservée aux grandes transactions commerciales ; elle irrigue tous les pans de notre vie, en famille, entre amis, avec des clients ou partenaires.
Malheureusement, nous sommes peu nombreux à avoir été formés à cet art fondamental.
Ayant moi-même très tôt identifié cette lacune en moi, j’ai suivi plusieurs MOOCs sur la négociation commerciale. L’un d’eux, dispensé par le professeur George Siedel de l’Université du Michigan, m’a véritablement enseigné par sa clarté et sa richesse. J’en ai tiré quelques principes essentiels que je partage ici avec vous, en attendant d’y revenir plus en détail dans un prochain billet.
Les fondements d’une négociation efficace
Pour bien négocier, il convient de clarifier plusieurs paramètres. D’abord, il faut définir un objectif précis : souhaitez-vous conclure un accord immédiat ou bâtir une relation sur le long terme ? Ensuite, vous allez interroger votre attitude : êtes-vous dans une logique rigide ou ouvert(e) à un compromis gagnant/gagnant ? Le style que vous allez adopter compte également : soit il est formel soit il est informel. Vous allez aussi choisir votre manière de communiquer, directe et explicite ou indirecte et nuancée. La gestion du temps entre ici en jeu : êtes-vous pressé(e) ou disposé(e) à laisser mûrir la discussion ? À cela s’ajoute la gestion des émotions : préférez-vous les exprimer ou les contenir ? Il faut aussi penser à votre stratégie d’accord : disposez-vous d’un contrat rédigé ou simplement d’une base à affiner ? La séquence de négociation est tout aussi importante : aborderez-vous en premier les détails ou les grandes lignes ? Par ailleurs, votre mode de décision peut varier selon que vous agissez seul(e) ou en concertation. Votre posture face au risque influera également : fixerez-vous un prix fort au départ ou adopterez-vous une approche plus modérée ? Enfin, il est indispensable de prévoir une alternative crédible à l’accord envisagé (BATNA), afin de ne pas négocier dans l’urgence ou sans marge de manœuvre.
Voici, de façon résumée, les dimensions clés à préparer pour toute négociation sérieuse.
La négociation est outil de souveraineté entrepreneuriale
En définitive, si l’accord en négociation n’est pas au moins aussi avantageux que votre meilleure alternative (ou s’il descend en dessous de votre “prix de réserve”), il est plus sage de se retirer. Insister serait préjudiciable.
Mais une fois l’accord conclu, engagez-vous pleinement. Offrez une prestation irréprochable. Car la qualité de l’exécution est aussi un levier de négociation future.
Réussir une vente n’est pas un coup de chance, c’est le fruit d’un processus structuré, conscient, stratégique.
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